Votre banque a-t-elle le droit de vous accuser de négligence pour éviter de vous rembourser en cas de fraude ?
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Publié le par Meilleurtaux Banques
Les arnaques sur compte bancaire se multiplient, avec pour conséquence des préjudices qui peuvent se chiffrer en dizaines de milliers d'euros. Si la réglementation est favorable aux victimes, les banques tentent pourtant parfois d’accuser leurs clients de négligence grave pour éviter de les rembourser. Mais encore faut-il qu’elles le prouvent.
1,24 milliard d'euros : c’est le montant total de la fraude aux moyens de paiement en 2021, selon les chiffres de la Banque de France rappelés par le site d’information MoneyVox. Soit une augmentation de 8%, qui s’explique par les modes opératoires de plus en plus sophistiqués des escrocs. Ceux-ci s’emparent en effet de vos données personnelles (état civil, adresse, numéro de téléphone et de carte bancaire, identifiants d’accès à votre banque) sur le web, au moyen de la technique de l'hameçonnage, aussi appelée phishing.
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100% des fonds dérobés doivent être immédiatement remboursés
Pire, ces cybercriminels contactent même parfois leurs victimes au téléphone, en se faisant passer pour un conseiller bancaire. “Les données personnelles volées leur servent ici à crédibiliser leur discours, dont la finalité est généralement de vous pousser à authentifier une opération à votre insu : un achat, un ajout de bénéficiaire de virements, etc. Le préjudice peut alors se chiffrer en dizaines de milliers d'euros”, souligne MoneyVox. Les malfaiteurs peuvent alors réaliser leurs achats en ligne sans difficultés. Au grand désarroi des établissements bancaires qui sont obligés de rembourser leurs clients sous un jour ouvré, en vertu de la loi dite pouvoir d'achat adoptée cet été par le Parlement.
Au maximum, les banques peuvent alors vous facturer une franchise de 50 euros. Mais seulement si l’escroquerie a été réalisée au moyen du code secret de votre carte bancaire, et à la condition que la banque parvienne à prouver votre inaction pour faire opposition directement après la perte ou le vol.
Et ce n’est pas tout. Si elle a omis de vous informer sur la procédure pour faire opposition, si votre carte bancaire a été contrefaite et que vous êtes toujours en possession de l'original, ou si le paiement frauduleux a été effectué sans qu'une authentification forte ait été exigée, vous êtes déclaré irresponsable. Il en est de même si la fraude est la conséquence du détournement de vos identifiants de carte bancaire (numéro unique, date de validité, cryptogramme) ou de compte bancaire (numéro de client et code secret) à votre insu.
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Une négligence grave nécessairement prouvée par les banques
En raison de cette réglementation protectrice des victimes, certaines banques ont trouvé la parade dans le Code monétaire et financier. En vertu de ce dernier, si la victime n’a pas satisfait, intentionnellement ou par négligence grave, à ses obligations contractuelles de sécurité, la banque n’a pas à rembourser intégralement et immédiatement les sommes dérobées. Mais qu’est-ce qu’une “négligence grave” ? Selon certaines banques, c’est le fait, pour un client, de ne pas avoir pris toutes les mesures raisonnables pour préserver la sécurité de ses données personnelles, et de les avoir divulguées aux pirates, ou même d’avoir validé une opération par une authentification forte.
Mais ce n’est pas l’avis d’UFC-Que Choisir, l’association de consommateurs, qui a déposé plainte en juin dernier contre une douzaine de banques pour « pratiques commerciales trompeuses ». Elle les accuse de faire croire aux victimes qu'elles « n'ont aucun droit au remboursement » et les duperait sur l'étendue de leurs droits.
À de multiples reprises, la plus haute juridiction judiciaire française, la Cour de cassation a rappelé certains principes. Notamment que les clients ne sont pas responsables a priori du piratage de leur compte bancaire, quand bien même les paiements ont donné lieu à une authentification forte. De plus, elle confirme que la banque a un devoir de vigilance et doit prévenir son client en cas d'activité inhabituelle sur son compte. Enfin, pour refuser leur droit au remboursement, les juges énoncent que c’est à la banque de prouver au cas par cas que son client a été négligent. Ce qui est très difficile en pratique.